Malpertuis
- Kategoria:
- fantasy, science fiction
- Seria:
- Bibliothèque Marabout
- Wydawnictwo:
- Marabout - Gérard
- Data wydania:
- 1971-01-01
- Data 1. wydania:
- 1971-01-01
- Liczba stron:
- 252
- Czas czytania
- 4 godz. 12 min.
- Język:
- francuski
- Tagi:
- powieść francuska dark fantasy bogowie greccy
Malpertuis : demeure de l'épouvante...
« Elle est là, avec ses énormes loges en balcons, ses perrons flanqués de massives rampes de pierre, ses tourelles crucifères, ses fenêtres géminées à croisillons, ses sculptures menaçantes de guivre et de tarasques, ses portes cloutées.
Elle sue la morgue des grands qui l'habitent et le terreur de ceux qui la frôlent.
La façade est un masque grave où l'on cherche en vain quelque sérénité. C'est un visage tordu de fièvre, d'angoisse et de colère, qui ne parvient pas à cacher ce qu'il y a d'abominable derrière lui.«
*
Une logique implacable
Au-delà de l'intrigue proprement dite, au-delà du pouvoir poétique qui constitue l'un des attraits majeurs du livre, au-delà de ce que le lecteur peut apprendre sur l'enfance, les goûts et les connaissances ésotériques de Jean Ray, Malpertuis est aussi et surtout une extraordinaire machinerie littéraire. En mettant en jeu plu sieurs narrateurs successifs (jusqu'à introduire sa propre personne comme personnage de roman), en faisant usage de plusieurs plans d'action tour à tour complémentaires qui se mêlent les uns aux autres, en bousculant les valeurs spatio-temporelles du roman traditionnel, Jean Ray, tout en suivant une trajectoire linéaire stricte, ne tend pas seulement à partir du plus simple pour gagner le plus compliqué, à verser au fur et à mesure au « dossier » de son récit des pièces de plus en plus mystérieuses, mais vise également une perfection formelle que la plupart des œuvres d'imagination pure n'ont jamais réussi à atteindre ni même à approcher.
On le sait, Malpertuis découvre une mullitude de thèmes et de réminiscences plus ou moins occultes (la réincarnation des dieux de l'Antiquité, la maison mau- dite, la Gorgone, le loup-garou, les rose-croix, etc.) et fait un étalage presque sordide d'incongruités et de sortileges (par exemple, le delire de Doucedame dans une alcôve du couvent des Peres Blancs). Tous ces éléments ne seraient rien, pourrait-on dire, s'ils n'étaient doses, mesurés, répartis tout au long du livre avec raison; rien non plus si une logique implacable ne leur donnait un sens précis; rien de surcroît si à l'image de la maison « qui sue la morgue des grands qui l'habitent et la terreur de ceux qui la frôlent », ils ayaient une architecture branlante et incertaine et n'étaient décrits ou évoqués que pour provoquer une acoumula tion de scènes d'épouvante. C'est en fait parce qu'ils sont intimement liés les uns aux autres, parce que sans cesse ils se font appel et se répondent, qu'ils prennent, au cceur du recit, une portée déconcertante. Ainsi, les personnages qui hantent Malpertuis et qu'un destin farouche oblige à partager le même toit, ne posent-ils aucun acte qui soit gratuit ou ne prononcent-ils aucune parole qui n'ait une signification; et lorsque celle-ci apparaît dans les derniers chapitres du livre, l'on est moins surpris par son caractère horrible que par son évidente clarté: la dame Cormélon ne pouvait être qu'une Euménide, Euryale ne pouvait être que la Gorgone et Jean-Jacques Grandsire cette proie naïve dont elle se disputaient les faveurs. Dès le départ, Jean Ray nous avait donné les preuves de cette relation et de la dualité de ces « créatures ». C'est ce réseau d'imbrications multiples qui rend la lecture de Malpertuis si envoûtante ; c'est grâce à ces incessantes interactions, grâce à la profusion des signes contenus que l'œuvre est parfaitement claire ; et c'est ce qui nous permet de dire aussi que le véritable roman fantastique est le roman le plus logique qui soit.
Jean-Baptiste Baronian
Bibliothèque Marabout - Fantastique #142